Remy Van den Abeele est né le 15 août 1918 à Dampremy (Hainaut).

A l'âge de cinq ans, en 1923, sa mère décède, le laissant à un père autoritaire, nomade et peu ouvert à la vocation artistique de son fils.
Jeté d'une école à l'autre, Remy est un piètre élève, mais un élève qui dessine très bien! Adolescent, sans qualification, il est contraint d'exécuter des travaux pénibles: tour à tour manœuvre,
garçon de ferme, meuleur, terrassier, marchand de charbon ambulant.
Il revient indemne de la dernière guerre. Après de nombreuses altercations avec son père, Remy peut enfin entamer des études à l'Académie des Beaux- Art s de Mons.
Il terminera sa formation à l'âge de 27 ans.
Il se marie en mai 1945 et aura trois enfants.
Imprégné par la technique picturale de son professeur Louis Buisseret, Remy Van den Abeele abandonne rapidement la peinture académique et se marginalise en peignant quelques œuvres d'un érotisme déroutant; étape avortée face à la désapprobation de quelques maîtres classiques. Il continue pourtant de se tourner vers un univers insolite, empreint des souvenirs d'une enfance douloureuse et d'un souffle de religiosité.
En 1946, le peintre se voit décerner le prix d'excellence «Médaille du Gouvernement» pour ses oeuvres.
Marcel Parfondry, qu'il rencontre en 1952, lui révèle la filiation surréaliste de son œuvre. Cette année-là, il expose ses toiles à Binche et en 1954 à la galerie Albert 1er à Bruxelles.
Peu après, certaines de ses œuvres sont sélectionnées pour le Grand prix international de Peinture à Deauville.
Il entre dans le groupe SCHÉMA en 1956, cercle surréaliste du Hainaut, fondé par son ami l'écrivain Achille Chavée.
La même année, le peintre est interviewé par Marcel Parfondry (voir page 59) et voyage en Italie grâce à une bourse de l'État belge.
Pendant ces années 1955-56-57, ses œuvres sont distinguées à la Jeune Peinture Belge. En 1961, il crée la couverture de la revue SAVOIR ET BEAUTÉ sur le thème du «Surréalisme en Wallonie»
et assure de 1961 à 1968 la direction de TENDANCES NOUVELLES à La Louvière.

A la même époque Van den Abeele est proche des surréalistes bruxellois; il se lie d'amitié avec Louis Scutenaire et son épouse Irène Hamoir, qui lui sont présentés par ses amis Evelyne et François Deknop.
Il rencontre également René Magritte, qui interroge Remy sur sa technique, notamment celle de ses fonds, si différente de la sienne.

PÉRIODE BLEUE

Jusqu'en 1970, Van den Abeele raconte son existence sur fond bleu: sphères et perles fines, bijoux somptueux, corps de femmes, cathédrales, poteaux électriques, arbres à deux branches...
Dès cette époque (février 1969), il expose dans la célèbre galerie Isy Brachot, à laquelle il sera fidèle pendant près de dix ans.

PÉRIODE BRUNE

Tous les thèmes de la période bleue se retrouveront amplifiés plus tard dans la période brune. Cette deuxième période, étalée sur quelques années seulement, revêt un caractère profondément mystique.
Le peintre convoque à sa suite des vies muettes, des cathédrales simplifiées, des sphères sensuelles, des éternels féminins, dans une gravité terrestre où la communication se cherche.

PÉRIODE BLANCHE (I)

Puis, les tableaux de Remy Van den Abeele vont peu à peu s‘éclaircir jusqu'au blanc pur. Dès lors, dans cette période blanche, les thèmes vont se succéder et se différencier...
Au début, ce sera surtout le domaine de la femme, que côtoient quelques dérisoires papiers imprimés.
A la même époque, en collaboration avec Jean-Pierre de Saedeleer, il réalise des bijoux-peintures. En 1976, certains de ses bijoux sont présentés dans le film L'or et l'œil de Jacqueline Pierreux.
De 1979 à 1983, il devient directeur faisant fonction de l'Académie des Beaux- Art s de Binche.
En 1972, Mme Jean Louthe réalise le film Remy Van den Abeele au Soleil de la Mi-Nuit avec un commentaire écrit par Louis Scutenaire et dit par Irène Hamoir.
À la fin de ces années 70, une révolte vient casser la sérénité du poète. C'est le début d'une période sombre durant laquelle l'artiste se sent dépressif.

PÉRIODE BLANCHE (II)

Cet épisode difficile s'achèvera grâce à son voyage à New York; sublime périple, puisqu'à son retour l'artiste oriente sa période blanche vers des «natures mortes» -
des objets futiles et leurs propres empreintes sur papier - qu'il peint sur des fonds invariablement blancs. On se rend compte enfin de sa technique éblouissante mise au service de la poésie.
Le musée des Beaux- Art s de Mons lui consacre une exposition rétrospective en 1982.
On aurait pu croire que le peintre arrivait à l'apogée de son oeuvre mais ce serait oublier que Remy Van den Abeele ne s'installe jamais. D'ailleurs, l'artiste rompt soudain avec la peinture.
«L'art du chevalet est révolu!», déclare-t-il. Dans les années 90, Remy Van den Abeele se consacre à de nouvelles expériences: empreintes de carton ou de plomb
et poutres brisées viennent s'ajouter à ses obsessions artistiques.
Une monographie écrite par sa fille Chantal paraît en 1990.
En 1997, Remy Van den Abeele est promu Officier de l'Ordre de la Couronne.
L'an 2000 approchant, il revient à la peinture. C'est l'époque des mannequins de cire et des statues de plâtre, parfois mêlés de chair humaine.
La Louvière , berceau du groupe surréaliste du Hainaut, lui rend hommage au Musée Ianchelevici en 1998.
A la fin de sa vie, Van den Abeele se retourne… Ses dernières toiles découvrent des silhouettes qui posent de dos et s'éloignent jusqu'à rejoindre ses propres paroles :

«Je suis venu à la peinture debout, de face, sur la pointe des pieds. Et je partirai debout, de dos, sur la pointe des pieds.»

Remy Van den Abeele s'éteint le 9 mai 2006.